mardi 9 juin 2020

Racailles, la populace, éloge. Poème à Michel. Les mineurs de charbons de Molière

La notion de racaille, de populace, de résidus de bidet, chiure de tarte aux quetsches et autres apothéoses. Ode à Michel et Judith

 H ----- Qu'est ce qu'une racaille* ? Vous avez 4 heures. 
H ----- étymologiquement c'est ce qui reste accroché au fond du chaudron ça dépend donc, pour le riz pilaf c'est le meilleur, pour les lentilles, le plus mauvais.... tout est relatif. 
J ----- Des râclures de bidet
H ----  Mms ça aussi pose pb. Ns sommes alors, pour bcp du moins, des racailles accrochées (à l'endomètre de maman) et les surnageants emportés, inélégamment appelés résidus de bidet, l'élite hélas disparue ds les océans. 
P ----- C'est une personne qui terrorise son entourage. Casse tout brûle tout crache sur son pays d'accueil raciste antisémite etc........
H ----- L'ennui est que le terme comme l'observe Maya qui le traduit par lumpen prolétariat, est fortement teinté de classisme. D'ostracisme injuste. Voire de racisme. On va  très vite vers ''Bicot, melon, négro, caraque etc''. Ms en gros ce st les pauvres ou ceux qui le figurent qui sont visés, on est donc tjrs la racaille de qq'un. A Clamart autrefois, qd je faisais mes courses au petit supermarché chic près de chez moi mal fringuée (jardin) en moto, sac à dos je me sentais clairement méprisée par des bourges talons vernis-tailleur-coiffeur. Ce pourquoi ce terme, qui a remplacé ceux de ma jeunesse ptt la guerre d'Algérie, trop connotés à présent, c'est comme les antibiotiques, ils deviennent inefficaces, je le réfute. Lorsque Pascal parle du pays ''qui l'accueille', il corrobore ainsi que le terme, concernant les ''étrangers'' est bien utilisé en remplacement des précdents racistes comme succédané .  

Du coup, ça m'inspire ... souvenirs. 

A MICHEL, auteur et ami cher
La populace dites-vous ?
Mais la populace, c’est moi, c’est vous… et même Nicole,
Enfin, j’espère…, ce sont ces soirées à l’école,
Le soir sous mes fenêtres, à Clé, la mine pour horizon...

Et les photos d’Ethel et de Julius enlacés, dans le fourgon,
Et les mineurs espagnols, entre Bakounine et Proudhon,
Et au ciné club le mardi, «Le sel de la terre»,
Silence et recueillement. La messe, la liturgie...
Dans la sombre salle des fêtes de Molières,
La lumière, l’étincelle ou l’iskra, la magie.

Et puis les femmes… les rires effrénés, les rêves,
Enfin on parlait d’elles et on osait… oui on osait !
Dire qu’elles aussi pouvaient mener une grève,
Pendant que leurs hommes dehors, lessivaient…
Essoraient, étendaient les draps durs et roides,
Puis, enfumant la masure de bois mouillé...
Devant la cuisinière éteinte et froide,
Lavaient la vaisselle et chauffaient les biberons…

Ou essayaient. Et couraient, et trébuchaient,
Et se brûlaient au chaudron...
Et le bébé qui hurlait…
Sous les ricanements des fils adolescents
Qui faisaient la différence entre papa et maman.

Oui, les rires de la populace…
A chaque fois, les mêmes rires vivaces.
De ceux qui pour nous sont montés
Sur les barricades, sous le feu,
Qui ont obtenu les congés payés...
La sécu et la retraite : si peu ?

Comme moi, vous en vivez.
Et même les concours. La valeur du mérite
Et non de la caste. La valeur écrite...
Déclarée. L’égalité pour les proscrits
Protestants et juifs et puis, et puis...

O, ils devaient être sales et même sentir mauvais
Parler mal aussi. Et pourtant, votre douce vie...
Sur la montagne, c’est à eux que vous la devez, aussi.
Nos ancêtres. Le droit d’écrire et de vivre,
Librement. Ma madeleine en somme.
Celle de tous les hommes.
Le droit de critiquer, d’aimer et de rire,
Aussi.

On m’a formatée.
Je suis un tank —actuellement en disponibilité—
Un tank romanesque. Un tank amoureux, un tank linké,
De la populace ou de ceux qui la servent plutôt…
—Car moi je suis inapte.— Il faut ce qu’il faut. 

Un médecin qui voulait être un Schweitzer anti rougeole.
Le Kurdistan libre d’un Kurde rescapé
Un peu assassin seigneur de guerre,
Oui, coco, il ne faut pas me la faire…
Et un juif pro palestinien, mouton noir courageux...
Qui voulait vaincre les sionistes —et les siens avec eux.—

Car la populace bourgeoise, cela existe, ma foi.
«Je voue à la bourgeoisie une haine
qui ne finira qu’avec moi»
Un peu excessif. Mais… Mais… Mon cher...

On pouvait dire ô Dieu, bien des choses en somme,
en variant le ton.
Par exemple tenez : cynique, à la Rhett Butler :
«Tout ce que je veux, c’est récupérer mes ballots — de coton—
Le reste, je m’en fous. Qu’ils s’entretuent si ça leur plaît…»

Précieux, le petit doigt levé :
«Mais je ne fréquente jamais les pauvres :
A quoi bon me faire vacciner ? »
J’ai prié pour qu’elle attrape le choléra sur place…
Et, merci Jésus, j’ai été exaucée.
—En fait, ce fut une monumentale chiasse,

Je sais, ce n’est pas chic mais la guerre, Michel
… N’est pas belle —
Rétrocédant à la salazopérine, mais avec séquelles :
Un trou du cul bien abîmé, de sanglantes fistules,
Une maladie… de prolétaire, un peu ridicule…
Il y a des filaires qui se croient tout permis !

Je l’avoue, et ne fus pas la seule, j’en ai ri.
Dies irae.
Les estérichiae choli,
Contrairement à vous, Michel, ne font pas le détail...
Entre Achra’fiéh et… valetaille,
Tout trou du cul étant bon à prendre
Comme tout os à ronger…
La guerre égalise. Colibacille sans frontières…

La populace ? Au fond, Michel, vous m’inspirez.
Dans le genre trivial mais qu’y puis-je ? Je suis vulgaire
Lorsqu’on me parle de vulgarité.
Par contraste et provocation. J’aime choquer, braire…
Avec les ânes, j’en suis, je le veux et cela me plaît.

Mais pourquoi cette passion ? Car vous avez raison,
C’est un peu éthique, volontaire.
Et même… controuvé.
Sans doute est-ce érotique ; il faut bien une explication.
Comme dirait J. T., une glorieuse, parfumée, agitée,
Elégante éléphante, (c’est fâcheux pour ferrer) :
—Naturellement, je n’ai jamais couché avec un ouvrier.
Voyons ! » Dans la conversation, comme on dit :
Je ne prends pas de sucre dans mon thé.

— Ils n’ont pas voulu de toi ?» Avec mon air Lydie,
Un sourire innocent sous la flèche cruelle.
Je sais faire aussi. Je copie.
Elle a ré attaqué de plus belle:
—Tu peux rire, toi non plus.» Erdal, merci.
(Sinon j’aurais menti.) —Bien sûr que si.
Et toc. Je n’ai évidemment pas fait le ratio.
Et elle se tût, étonnée que, si sage,
J’osasse, même au terme d’un vernissage
Un peu arrosé, tenir de si horribles propos.

Une fêlée, en plus ? Anti corridas, on le savait,
Mais là, tout de même. Vulgaire, presque salace.
Un ou-vri-er ? Il y a des limites. Cela ne se pouvait.
Devant les biscuits. Qui faisait rigoler la populace…

Mais la populace esthète, éthique et classe.
La mienne, je me suis régalée. Cayetana.
La populace, Michel, c’est aussi moi
Car je suis snob, voilà.
Je le dis et le proclame,
La populace m’enchante et m’envoûte
Comme d’autres, les riches. Mon âme
Est ainsi cistronnée. Un gêne ? Sans doute.

La dignité. Des pauvres, des femmes, des juifs, des ratés,
Qui furent jetés comme je l’ai été, pour d’autres raisons.
Oui, ce doit être cela, simplement : la dignité,
Pouvoir parler à tous sans souci de ce qu’ils sont.
Enfin presque. Pouvoir écrire cela et en rire,
Sans en mourir.

Soit, je n’ai pas aimé l’histoire de Maigrat (l’épicier)
De Germinal. Et pourtant cela a dû exister, je sais,
Et celle du vieux mineur qui étrangle Cécile,
Et tout ce qu’il décrit, Chaval, la foule vile…
Bon. Mais ma populace à moi, devant les puits,
La mine, ce n’était pas cela. Ou pas seulement.

J’ai appris les lettres d’Ethel à ses fils.
Sublimes. Ses fils de mon âge, exactement.
Des papiers interdits. La honte envolée.
Des syndicalistes. Des anciens d’Espagne. Dignes et forts.

Je n’ai pas vu de différence des discussions et des corps,
Le soir entre les militants ; ensuite, à l’université.
Ou plutôt si : leur teneur était plus juste et plus vraie.
Ma madeleine…
Ma liturgie. Amen. Et merci.

Hélène.

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